« Si tu veux comprendre le mot de bonheur, il faut l’entendre comme une récompense et non comme un but. » Antoine de Saint-Exupéry
Tous les hommes aspirent au bonheur mais très peu sont capables de lui donner une signification : qu’est-ce qui fait le bonheur ? Y a-t-il des recettes ? Où se niche le bonheur ? Dans l’argent ? La réussite ? La santé ? L’amour ? L’espérance d’un jour meilleur ? Est-il dans ce que nous avons ou dans ce que nous sommes ? Cette question a divisé penseurs et philosophes depuis l’Antiquité.
Scène de vie : Marie a tout pour être heureuse : un conjoint aimant, un travail épanouissant, un appartement au centre-ville, des enfants en bonne santé, des amies fidèles, des projets … ! Et pourtant… Elle a toujours de bonnes raisons de se plaindre : l’absence de jardin, l’envie de voyage, la pression de son chef, la voiture à changer, la météo pluvieuse… Le bonheur est-il un état d’esprit ou un fruit à cueillir sur l’arbre de la vie ?
Un contenu indéterminé
Le concept du bonheur est indéterminé en dépit du fait que tout le monde aspire à l’atteindre. Aucun élément précis ne peut être mis en avant. Il n’y a pas consensus sur des éléments objectifs qui seraient constitutifs du bonheur. La richesse, la beauté, le travail, la santé ou le pouvoir ne conduisent pas automatiquement au bonheur. « Le concept du bonheur est un concept si indéterminé, que, malgré le désir qu’a tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et il veut. » Emmanuel Kant, philosophe allemand.
Le bonheur est une chose très difficile à définir car chaque Homme en a une vision différente. Tout le monde souhaite être heureux, c’est en général le but de toute vie. Mais certains désirs de l’Homme ne sont pas réalisables ; c’est pour cette raison que le bonheur est très difficile à atteindre, voire impossible. De plus celui-ci n’est pas durable. En effet un Homme ne peut pas être heureux toute sa vie, tout le temps !
La « recette » du bonheur selon Epicure
En tant qu’optimum de la vie humaine, le bonheur est universellement recherché. On le présente souvent comme le but le plus élevé de l’existence. Pourtant, dès l’antiquité les philosophes ont mis en évidence qu’accumuler les plaisirs éphémères ne suffit pas à être heureux. Mieux vaut alors chercher notre bonheur dans des plaisirs durables : amour, amitié, famille, don, passion. Mais la déception peut survenir car ces objectifs ne conviennent pas à tous.
Epicure a écrit le premier traité sur le bonheur dans La lettre à Ménécé ! L’épicurisme n’est pas une philosophie de la jouissance sans entrave, qui justifierait gourmandise ou luxure. Selon lui, le bonheur ne peut pas être atteint dans l’excès. Nous avons un corps qui a des sensations, alternant plaisir et douleur. L’homme recherche le plaisir et fuit la douleur. Pour être heureux il ne suffit pas de courir après le plaisir. Il lui faut modérer le plaisir afin qu’il ne devienne pas douleur. A partir du moment où on ne maitrise pas son désir, le bonheur nous échappe. Pour Epicure, il faut rejeter tous les désirs qui ne sont pas naturels et qui ne sont pas nécessaires à notre survie, à notre santé ou à notre bonheur.
Le désir peut être source de bonheur s’il est maitrisé
Un désir est une force intérieure qui nous pousse vers un « objet » (en philosophie un objet peut aussi être une personne) en vue de se l’approprier. Il y a trois sortes de désir selon Epicure :
- Naturel et nécessaire : manger, respirer : le sage peut s’y adonner sans modération.
- Naturel et non nécessaire : manger des plats raffinés, acheter une voiture : ces désirs peuvent être satisfaits avec modération.
- Non naturel et non nécessaire : richesse, renommée : le sage doit les éviter car ils sont artificiels et insatiables.
Le désir est un état caractérisé par un sentiment de manque et de privation car nous désirons ce que nous n’avons pas ou ce que nous avons perdu. Mais le désir en tant que « mouvement vers » est aussi une force qui pousse l’Homme à agir et lui permet de découvrir le monde et les autres. Il faut donc retenir du désir son ambiguïté, car le désir est à la fois manque et énergie créatrice. Le désir joue un rôle fondamental dans la vie humaine. Lors de leur satisfaction, les désirs sont source de plaisir, sous réserve de ne pas se laisser emporter par « l’hubris ». La démesure fait de l’Homme un esclave de son propre désir.
Ne confondons pas plaisir et bonheur
Le plaisir désigne une satisfaction immédiate d’un désir, qui s’accompagne donc d’une sensation de bien-être, souvent momentanée. C’est une sensation positive et agréable et essentielle au fonctionnement du système de récompense propre aux mammifères que nous sommes. A propos des réseaux sociaux, Pierre Portevin, coach en développement personnel, explique que « ce qu’on nous vend, ce n’est pas du bonheur, c’est du plaisir. Il faut mettre beaucoup de nuances entre ces deux termes car le plaisir contribue au bonheur mais pas que…!«
Le plaisir est une passade, caractérisée par sa brièveté : un carré de chocolat, une nouvelle montre, un voyage. C’est le fruit d’un résultat, non d’une réflexion ou d’un cheminement qui nourrit l’esprit. Les objets et expériences qui procurent du plaisir sont souvent monnayables, à grand renfort de publicité. Le plaisir s’obtient en général sans effort et ne se partage pas.
Qu’est-ce que le bonheur ?
Le bonheur est un état de satisfaction complète, caractérisée par sa stabilité et sa durabilité. Il ne suffit pas de ressentir un bref contentement pour être heureux. Une joie intense n’est pas le bonheur. Un plaisir éphémère non plus. Le bonheur est un état d’esprit qui s’inscrit dans le temps et dans le mental. Ce n’est pas si simple le bonheur, on ne peut ni le décréter, ni l’imposer mais seulement le favoriser.
Pour Epicure, le bonheur se gagne dans la mesure. Pour Aristote, le bonheur dépend de trois facteurs : la vertu, c’est-à-dire les qualités morales (le courage, le discernement…), le lien (la relation aux autres) et la chance.
Il n’y a pas de recette miracle. « Le plus grand secret pour le bonheur est d’être bien avec soi. » écrit Bernard de Fontenelle, écrivain français.
Le bonheur est l’idéal que tout homme cherche à atteindre, consciemment ou non. Mais savons-nous être conscients d’avoir atteint ce but ? Pas toujours ! Nous en voulons toujours plus. Jamais contents ni pleinement satisfaits. Et si l’on appréciait tout simplement ce que nous avons ou ce que nous avons réussi ?
La tyrannie de l’immédiateté et de la consommation
Tous les indicateurs sont en amélioration depuis des générations : l’espérance de vie augmente, l’alphabétisation progresse, le nombre d’homicides régresse, l’accès à la culture se généralise, la pauvreté diminue. Pourtant, «la stagnation du pouvoir d’achat provoque une souffrance intense alors même qu’en France l’individu moyen est quatre fois plus riche qu’en 1960», s’étonne Daniel Cohen, économiste. Dans le même temps, le nombre de burnout, bore-out et brown-out explose ! L’effondrement des transcendances collectives (religieuse, idéologique, …) a laissé un vide abyssal. En fait, le cerveau a besoin d’autres choses, autrement plus fondamentalesque la tyrannie de l’immédiateté et de la consommation. Le bonheur est une construction éminemment complexe et fragile qui se nourrit avant de tout de sens. Les activations cérébrales, dès que le sens entre en scène, sont infiniment plus riches que le seul circuit hédonique du plaisir. Sans connaitre le sens de notre vie, il est difficile d’être heureux.
Les découvertes des neurosciences
Depuis les années 1970 les recherches sur les neurosciences dévoilent la « chimie » du bonheur. Ils s’invitent dans un débat jusqu’alors réservé aux penseurs, aux poètes et aux philosophes. En réalité, certaines sources de bonheur comme l’amour, le plaisir, la plénitude ont des constituants biologiques. En effet La dopamine, la noradrénaline, la sérotonine, les endorphines ont une fonction essentielle dans la stimulation ou l’annihilation des émotions. Tout individu dispose de ces composants du bonheur. Pourtant les prédispositions au bonheur varient d’un sujet à l’autre. Si les ingrédients ont été repérés, leur dosage relève encore de l’alchimie, nous explique Martine Betti-Cusso, journaliste. «En fait, les taux de ces neurotransmetteurs connaissent des fluctuations, des variabilités selon les individus», explique Sylvie Granon, chercheuse au Centre de neurosciences Paris-Sud. Y aurait-il en chacun de nous des prédispositions biologiques au bonheur ?
Bonheur, qualité de vie ou bien-être au travail
Le bonheur est un état personnel et individuel. A ce titre, ce concept philosophique n’a pas forcément sa place en entreprise. Selon l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail, la qualité de vie au travail « est une perception qui résulte des conditions dans lesquelles les collaborateurs exercent leur travail et leur capacité à s’exprimer et agir sur le contenu de celui-ci. » Autrement dit, la qualité de vie est influencée par des conditions objectives de travail et d’organisation dans l’entreprise.
Selon le dictionnaire Larousse, le « bien-être est un état agréable résultant de la satisfaction des besoins du corps et du calme de l’esprit ». La notion renvoie aux attentes de l’individu en termes de santé ou de confort.
Il n’y a jamais eu autant de mal-être dans les entreprises qu’aujourd’hui, alors que les managers et les entreprises n’ont jamais fait autant d’efforts en faveur du bien-être des salariés ! L’essentiel pour moi réside dans le sens, l’autonomie et la reconnaissance des collaborateurs. Il est difficile de trouver le bonheur au travail. En revanche, le bien-être est un objectif concret et atteignable. L’entreprise a un rôle à jouer pour mettre en place le cadre qui permet d’optimiser ce bien-être.
De plus, le bien-être au travail est l’affaire de tous. Pour connaître le bien-être au travail, la première action est de changer de comportement pour devenir un acteur de ce bien-être.
Conseil du coach
Être heureux c’est possible, à condition de le décider, de le vouloir vraiment et d’y travailler. Le bonheur est un état d’esprit. On peut apprendre à être heureux de la même façon qu’on peut apprendre à faire un gâteau aux pommes ou à jouer au tennis. S’occuper de son bonheur, c’est le construire soi-même, se lever et aller le chercher.
- Prendre le temps de s’aimer : cultiver son bonheur intérieur, prendre soin de soi-même et se faire plaisir en étant attentif à ses besoins.
- Décider d’être heureux : ne pas attendre que tout soit parfait pour choisir de créer son propre bonheur.
- Vivre dans l’instant : admirer un paysage, savourer un repas, apprécier un livre, accepter un compliment…
- Apprécier ce que vous avez : s’arrêter pour gouter les évènements heureux, remercier pour chaque don de la vie, cultiver une attitude de gratitude.
- Être bienveillant et généreux avec son environnement : cela provoque une plus forte activation des neurotransmetteurs cérébraux qui procurent le bien-être.
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