Rebondir après un échec

Réussite et échec sont les deux faces d’une même pièce. L’échec demeure parfois un passage obligé pour atteindre le succès. Apprendre à surmonter un échec, c’est apprendre à le vivre comme une simple étape du processus d’apprentissage pour s’améliorer, et non le vivre comme une sanction définitive.

“L’échec est le fondement de la réussite.” Lao Tseu

Qu’est-ce que l’échec ?

Réussite et échec sont les deux faces d’une même pièce : tous deux sont des résultats. Ils ne sont donc que les conséquences d’un mode opératoire. Accepter l’échec, c’est se préparer à rebondir, car cela inhibe son pouvoir dévalorisant. Le dictionnaire Larousse décrit l’échec comme le résultat négatif d’une tentative. En d’autres mots, on ne peut échouer que si l’on essaie, que si l’on ose. Aussi pénible soit-il, l’échec n’a pas vocation à durer dans le temps. C’est un signal d’alarme !

Dans la vision traditionnelle de la vie professionnelle, symbolisée par la notion de « carrière », l’échec est une épreuve. Le principe du fail fast, fail often anglo-saxon fait de l’échec un jalon, presque un rituel initiatique. C’est une étape dans un processus de construction personnelle.

Ce rapport à l’échec, entendu comme une étape constitue l’un des ressorts les plus fondamentaux de entrepreneuriat. Henry Ford qui connut plusieurs fois la faillite avant de fonder le géant de l’automobile disait que : « l’échec n’est qu’une opportunité de recommencer plus intelligemment ».

L’échec fait partie de la vie

Même si l’échec participe au processus d’évolution, il reste dévastateur : remise en question de son potentiel, blessure égotique, perte de confiance. C’est l’estime de soi qui est mise à mal lorsqu’on affronte un échec. Les conséquences en sont : l’isolement, le déni, la colère, voire la révolte contre un sentiment d’injustice. La complexité dans la notion d’échec vient du fait que nous le prenons comme la manifestation d’une volonté extérieure. Il nous faut donc accepter de lâcher-prise. Les exemples de J.K. Rowling, chômeuse avant le succès d’Harry Potter, Steve Jobs, viré d’Apple, Michael Jordan, exclu de son équipe de basket, montrent que l’échec peut être la première étape du succès.

Le poids de la culture de l’échec

Aux Etats-Unis, l’échec est synonyme d’expérience et la marque des audacieux, selon Charles Pépin, auteur « des Vertus de l’échec ». Ainsi, outre-Atlantique, «les banquiers s’intéressent deux fois plus à quelqu’un qui s’est cassé la gueule», rapporte Marc Lévy. Celui-ci fut entrepreneur malheureux avant de devenir l’un des écrivains français les plus lus. En France, l’échec a encore un relent d’incompétence. Il est trop souvent mal perçu. En cas d’échec, c’est parce que l’acteur a été mauvais. Dans leur majorité, les entrepreneurs français considèrent l’échec comme un résultat préjudiciable. Seuls 18% des entrepreneurs allemands interrogés jugent l’échec comme étant «inacceptable», contre 31% en France!

L’échec et la réussite

Dans nos entreprises, le droit à l’erreur reste trop souvent un discours d’intention. Peu d’organisations l’intègrent dans leur culture. La société et les organisations communiquent continuellement des « success stories ». La survalorisation du succès laisse en réalité de nombreuses questions en suspens. Cette posture

  • occulte le fait qu’oser, c’est aussi courir le risque de l’échec. 
  • évacue le fait qu’on peut parfois échouer plusieurs fois avant de réussir. 
  • incite à reproduire des recettes, plutôt que de s’ouvrir aux idées nouvelles.
  • oublie que l’on apprend davantage de ses propres échecs que des réussites.

Le temps est venu d’oser mettre en avant ceux qui ont eu le courage d’échouer. Aux Etats-Unis les start-up se réunissent dans une conférence spécifique, la « Fail Conférence », pour partager leurs expériences d’échecs. La 5ème édition de la « FailCon » à Grenoble propose un programme pour dédramatiser l’échec.

Accueillir l’erreur dans l’éducation

En France, globalement, le système éducatif sanctionne l’erreur. Elle est trop souvent considérée comme un échec, avec son cortège de sanctions et de commentaires négatifs. L’erreur perd ainsi son statut d’information. De surcroît, les erreurs sont souvent perçues comme un manque d’intelligence ou comme un manque de travail. Or, « l’erreur ne fait pas seulement partie du processus d’apprentissage, elle en est la condition », d’après Céline Alvarez, pédagogue. Or, cet apprentissage n’est pas un processus linéaire. Il passe par des essais, des tâtonnements, des erreurs… Cette quête de la perfection paralyse l’enfant, à l’idée de décevoir et d’être jugé. Elle réfrigère les initiatives, l’audace, la créativité. À l’école comme en famille, il est primordial de créer un climat où l’erreur n’est pas une impasse : elle doit être dédramatisée pour que l’enfant puisse progresser.

L’échec, une étape vers la connaissance de soi-même

Nos échecs nous poussent à nous questionner sur ce que nous sommes par essence. Chacun d’entre eux est une occasion de se réinventer. C’est ce que Nietzsche résume par : « Deviens ce que tu es ». Faut-il se formaliser à la suite à nos échecs professionnels ou personnels ? Poser un autre regard permet d’y voir des opportunités pour parvenir à ce qui compte vraiment pour nous. Un jour, Soichiro Honda se présente à un entretien d’embauche chez Toyota. Il n’est pas engagé. Honda connait une longue période de chômage.  Il en profite pour réfléchir au lancement de ses propres véhicules. On connait la suite ! Michel Tournier voulait réussir l’agrégation de philosophie mais il a échoué pendant des années. A 42 ans, il publie son premier roman : Vendredi ou les limbes du Pacifique. Publié en 1967 aux éditions Gallimard, il a reçu le Grand prix du roman de l’Académie française la même année.

Le rebond après une liquidation entrepreneuriale

La liquidation d’une entreprise induit généralement un traumatisme financier, professionnel et personnel pour son dirigeant. Entre stigmatisation sociale et perte de confiance en soi, le rebond est difficile : cela concerne aussi bien les entrepreneurs que chacun d’entre nous. En 2012 en France,  il y avait 60 000 liquidations par an. L’association 60 000 rebonds est née de ce constat et de l’expérience personnelle de son fondateur, Philippe Rambaud. L’accompagnement d’un entrepreneur post-liquidation y est totalement bénévole et gratuit. Il peut se dérouler jusqu’à 24 mois. Grâce à sa méthode unique d’accompagnement, l’association s’appuie sur 3 types de compétence :

  • Le coach participe à la prise de recul et aide à la reprise de confiance.
  • Le parrain, chef d’entreprise, accompagne l’entrepreneur en rebond dans la recherche de son nouveau projet.
  • Les experts métier apportent leur compétence dans des domaines variés : juridique, expertise comptable, marketing, RH, commercial, Internet, finance … 

A travers ses actions, 60 000 rebonds contribue également à faire évoluer en profondeur le regard sur l’échec en France.

Les différentes étapes du rebond

Nous réagissons tous différemment face à l’échec. Il fait mal et amène avec lui une nuée d’émotions négatives : déception, tristesse, frustration, colère…

  • Soyez honnête avec vous-même. La vérité peut blesser mais elle vous rendra plus fort.
  • Écarter tout déni. La première chose à faire est d’accueillir les émotions négatives et d’en assumer la douleur. Pour retrouver l’énergie et la motivation, l’équipe, le manager, le dirigeant a d’abord besoin de clore cet échec.
  • Se pardonner : faire la distinction entre sa personne et son résultat. Il ne faut pas confondre l’échec du projet avec celui de la personne.
  • Interroger son échec : il existe souvent une conjonction de facteurs. L’échec n’est pas uniquement la conséquence d’une mauvaise décision. Il peut y avoir des aspects techniques, comportementaux, environnementaux, de timing…

Lorsque vous aurez recensé ces raisons, vous pourrez décider comment réagir autrement dans une situation similaire.

Conseils du coach

Les revers de la vie nous apprennent à grandir et à mieux comprendre le monde qui nous entoure. Un échec signifie qu’il y a quelque chose qu’on n’a pas bien compris ou bien fait, pas qu’on est incapable de réussir. Le coach est dans une posture « d’interrogation bienveillante » pour :

  • aider la personne à reconnaître son échec.
  • dédramatiser, car tout le monde commet des erreurs. 
  • permettre à l’entrepreneur de réaliser qu’échouer est un levier de développement professionnel.
  • accepter sa part de responsabilité : il est toujours plus simple de stigmatiser ses collègues, la conjoncture, l’environnement ou le manque de chance.
  • relativiser en inscrivant cette expérience malheureuse dans un bilan global positif, en valorisant la qualité générale de son travail, ses points forts, ses compétences.
  • l’inciter à se rapprocher de groupes d’échanges, comme par exemple l’association 60 000 rebonds.

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