« La tâche principale de l’esprit est de libérer l’homme de son ego » Albert Einstein
L’ego est un sujet aussi passionnant que galvaudé et qui nous touche tous. Il se manifeste au travers d’une panoplie infinie de masques, portés inconsciemment. Ce n’est pas grave, mais ils nous limitent car nous ne sommes pas notre métier, notre intelligence ou notre fortune. Pourtant l’ego est nécessaire si nous ne lui abandonnons pas les commandes de notre vie.
Scène de vie : Claire est assistante de direction. Elle est dévouée, compétente et efficace. Ayant souffert d’une blessure d’abandon dans son enfance, elle est hypersensible. Un matin, voyant son manager passer à plusieurs reprises devant son bureau sans la saluer, elle s’interroge. En attente d’attentions et de reconnaissance, elle sur-réagit et va chercher en elle les raisons de cette attitude qu’elle juge discourtoise. Préoccupé par un problème particulier, son manager ignore l’incidence de son comportement. Et il constate le retrait de son assistante et va, lui aussi, se questionner sur sa propre responsabilité.
Les ego ont pris le pouvoir !
Qu’est-ce que l’ego ?
Substantif tiré du pronom personnel latin et grec «ego», l’ego signifie « moi » ou « je ». Il désigne la représentation mentale que nous avons de nous-mêmes. Il se présente sous la forme de masques que nous portons, souvent inconsciemment.
L’ego est la partie de nous qui s’est construite avec l’extérieur. C’est un disque dur qui a stocké toutes nos pensées limitantes et nos croyances liées à l’enfance et à l’éducation : tu es comme ci, tu dois faire ça, tu ne dois pas dire ceci, tout ce qu’on a dit de vous, toutes les expériences malheureuses de vous-mêmes et même celles des autres. En fait, l’ego se nourrit de conditionnements sociaux et culturels.
Selon Christophe André, psychothérapeute, « l’ego est un mal nécessaire, comme un véhicule de location. Nous avons besoin de lui pour traverser la vie, comme d’un moyen de locomotion. ». Ainsi, l’ego est incontournable.
Caractéristiques de l’ego
Nous avons tous un ego, … surdimensionné ou pas. L’ego représente le pouvoir et la puissance quand nous nous comparons aux autres. C’est la partie de nous qui veut exister quel qu’en soit le prix. Il est le fruit de la dévalorisation, du sentiment de manque, des pensées fondées sur la peur de soi-même, des autres et du monde. C’est la partie de nous qui sait ou qui croit savoir. Il veut avoir raison. Il est dans le jugement et la critique. L’ego est en mode réactif : « ce n’est pas de ma faute, c’est ma nature, je ne peux pas me changer ».
Pourtant, l’ego est nécessaire. Il apparait dès la première année de vie lors de l’apprentissage du langage. L’enfant comprend, avec la capacité d’exprimer ses besoins, qu’il est un être à part entière. Notre ego est aussi une protection. Il conforte la confiance en soi. C’est cependant une question de dosage. Il ne faut pas le laisser seul aux commandes.
Fonctionnement de l’ego
L’ego se manifeste à travers l’envie de possession, d’action ou de rejet. Il fonctionne selon 3 modes :
- L’avoir. Je suis ce que je possède : un téléphone, une robe, une maison. Plus je possède, plus je suis quelqu’un.
- Le faire. Je suis ce que je fais. Donc plus je fais, plus je suis reconnu. Ce mode de fonctionnement entraine une suractivité débridée qui impacte la gestion de notre temps.
- La séparation. Notre ego veut qu’on soit unique pour avoir une existence indépendante. Or, pour se sentir unique il faut se sentir différent. Donc, l’ego nous sépare des autres.
En s’identifiant à notre métier, notre beauté ou notre capital, la peur de ne pas être assez compétent, assez beau ou assez riche s’installe. La moindre critique de mes idées ou de mon travail peut alors être ressentie comme un jugement de ce que je suis !
La tromperie de l’ego
Sait-on qui nous sommes au plus profond de nous-mêmes ? Face à cette incertitude, la tentation est de se raccrocher à ce que l’on croit être nous et qui ne l’est pas. L’ego est la partie de l’homme qui le conduit à tout ramener à lui. Kant écrivait que « La volonté de faire le bien de l’autre est l’essence même de la tyrannie ». Difficile d’entendre cela quand une personne passe sa vie, notamment dans le bénévolat, à donner de son temps aux autres. Pourtant, derrière cette belle générosité, se cachent parfois des motivations qui témoignent de la puissance de l’ego.
L’ego a un pouvoir anesthésiant considérable sur nous-mêmes. Il nous faut donc être très vigilant. Notre ego se manifeste souvent au-travers du désir, bien souvent inconscient, d’imposer aux autres sa vision, sa façon de penser ou d’agir. Or, chacun agit en fonction de la compréhension qu’il a de lui-même et de l’être spirituel qui est en lui.
Les différentes parties de l’être
Nous sommes des êtres spirituels incarnés dans un corps physique avec quatre « niveaux de conscience » :
- Physique : le corps protège notre esprit et nous parle à travers nos 5 sens. Il nous relie au monde extérieur. C’est un fidèle serviteur si nous gardons une bonne hygiène de vie.
- Mental : l’esprit pense, apprend, raisonne, décide. C’est lui qui nous permet de nous faire comprendre.
- Cœur : le cœur est le siège de nos ressentis et de nos émotions. C’est notre guide qui nous met en action.
- Spirituel : l’âme est notre partie divine. Celle qui donne du sens à la vie et à nos actions personnelles et professionnelles.
L’ego a son siège dans notre corps mental et n’est donc qu’une partie de nous-mêmes. Il est là tout le temps et prend plus ou moins de place en fonction de l’importance qu’on lui accorde. De plus, nous avons vu qu’il était difficile de nous en défaire.
A quoi sert l’ego ?
L’ego est aussi la partie de nous qui est blessée. Notre nature est confrontée à des environnements qui ont des disfonctionnements, des attentes, des exigences, des inquiétudes. Ces attitudes contradictoires à notre nature profonde peuvent provoquer des blessures. Il y a 5 grandes blessures selon Lise Bourbeau, auteure : le rejet, l’abandon, la trahison, l’humiliation et l’injustice. L’ego adopte des comportements, des masques qui visent à cacher ces blessures et à nous protéger. Il fait de l’ombre à notre personnalité authentique.
L’ego est en relation directe avec notre volonté de réussir. La réussite est une nécessité afin de se valoriser à travers le regard des autres. Un échec représente alors une vraie déception que nous avons du mal à accepter. Nous pouvons même en arriver à rejeter la faute sur les autres.
Il est donc essentiel de comprendre quels sont les blessures dont nous souffrons, au travers d’un vrai travail de compréhension de nous-mêmes. C’est indispensable pour regagner confiance et estime de soi. En attendant, attachons-nous à identifier et à comprendre l’influence de notre ego.
Comment l’identifier ?
« Aux yeux de l’ego, le moment présent n’existe quasiment pas car seuls le passé et le futur lui importent. » nous dit Eckhart Tolle, enseignant et auteur. C’est à dire que le présent l’insatisfait et il recherche ailleurs ce qui pourrait le contenter.
L’ego veut maintenir le passé en vie pour justifier ce que nous sommes devenus ou ce que nous vivons. Sans lui, que serions-nous ?
L’ego se projette constamment dans le futur pour y trouver une forme de satisfaction. Cette projection prend la forme d’un avenir serein dans lequel nous serons heureux sous réserve que ceci ou cela se produise.
Si vous êtes dans une de ces deux configurations, vous êtes hors du présent et enfermé dans votre mental. Aussi, pour savoir véritablement qui nous sommes, il faut aller au-delà de notre personnalité, de notre ego et de notre mental. Il nous faut aller dans notre être, dans notre âme. Sans choisir entre l’être ou l’ego, il nous revient de diminuer l’importance de l’ego et d’augmenter la part de l’être.
Equilibre entre affirmation de soi et égoïsme
À une époque où tout contribue à une culture du moi à outrance, l’égoïsme n’a jamais eu aussi bonne presse. Le culte de l’enfant roi et le miroir des réseaux sociaux conduisent à développer un narcissisme décomplexé. Toutefois, cet égoïsme recèle de grandes fragilités face à la crise, en particulier la solitude. Inversement un ego en berne induit une tendance à se dévaloriser et des difficultés à savoir dire non. Ainsi, une confiance en soi excessive est tout aussi dangereuse qu’une mésestime de soi, génératrice de peur. En effet, si l’ego est indispensable à l’affirmation de soi, lui donner toute la place est malsain.
Entre affirmation de soi et égoïsme, la frontière est parfois mince. Il s’agit de garder une bonne estime de soi et de se sentir en lien avec les autres. La crise actuelle a permis de prendre conscience de l’importance des interdépendances. Elle signe le retour du « nous », des liens collectifs, de la coopération et de la communauté. L’autre n’est pas une menace mais un allié potentiel.
Comment vivre avec l’ego ?
En premier lieu, évitons de combattre l’ego, car ce serait une lutte contre une partie de nous-mêmes ! C’est le début du chaos. De plus, c’est le meilleur moyen de renforcer sa puissance. Il a juste besoin d’être reconnu et que nous prenions conscience :
- que l’ego fait partie de nous ;
- qu’on a adopté certains comportements par conditionnements et par habitude ;
- qu’il est important de reconnaitre et d’accepter les différentes facettes de notre personnalité, y compris nos vulnérabilités ;
- que notre être existe à l’intérieur de chacun de nous !
- qu’il est nécessaire d’identifier les messages qui proviennent de notre ego et de s’en détacher ;
- que pratiquer une discipline comme la méditation, permet d’évacuer les pensées limitantes et de se recentrer sur le présent.
En fait il est possible de canaliser l’ego, en découvrant la puissance incroyable de nos actes lorsque l’on sert une cause qui nous dépasse.
Conseil du coach
L’ego a une identité. Il représente « le faire », « l’avoir », l’isolement, le passé et le futur. L’être vit dans le présent et notre « nous » inclut les quatre plans de notre conscience : le corps, le mental, l’émotionnel et le spirituel. Nous sommes donc ces quatre éléments et non une seule partie !
Rappelons-nous de la devise inscrite sur le fronton du temple d’Apollon à Delphes : « Connais-toi toi-même » et « rien de trop ». Elle invitait les hommes à redevenir eux-mêmes et à ne pas succomber à l’hubris. Elle conduit à prendre du recul et à se regarder faire : que ferai-je si je n’avais pas peur ?
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