L’art de poser ses limites pour pouvoir dire « non »

Dans la vie de nombreux conflits émergent parce que nous ne savons pas poser nos limites. Vous arrive-t-il d’avoir peur d’exprimer votre désaccord avec votre patron, vos amis ou au sein de votre famille ? Vous est-il déjà arrivé d’être gêné par ce que quelqu’un vous a dit ou demandé, sans pouvoir vous positionner ? Si vous avez répondu oui à l’une de ces deux questions, cela signifie que vous avez des difficultés à poser vos limites dans vos relations avec les autres.

« L’autre va jusqu’où je le laisse aller. Dans les domaines où je suis clair, l’autre ne pénètre pas, sauf si je l’y autorise. » J. Salomé

Scène de vie : Lucie s’occupe de son jardin avec amour et passion. Elle y fait pousser des plantes au parfum délicat, des légumes savoureux et des arbres aux fruits délicieux. Lucie n’a pas mis de clôture et son jardin est ainsi accessible à ceux qui souhaitent s’y promener. Cela correspond à sa nature généreuse. Cependant, ses visiteurs ne sont pas tous des admirateurs respectueux de son travail : voleurs, ravageurs, sans gêne … Lucie trouve effectivement que les gens sont sans-gêne. Elle aimerait poser une clôture mais elle n’ose pas parce qu’elle a peur de se faire mal voir par les voisins …

Qu’est-ce qu’une limite ?

Une limite est une borne posée par notre environnement ou posée par nous-mêmes. Elle nous protège et nous enferme à la fois. Elle a pour caractéristique d’être soit « limitante » soit « aidante ». Je vois une limite comme un avertissement intérieur. Un panneau “attention” qui clignote quand je m’aventure au-delà ou lorsque quelqu’un rentre sans autorisation dans mon espace personnel. Je ressens alors un état de fatigue, d’irritabilité ou d’impatience qui sont autant d’indicateurs internes. Je peux choisir d’en tenir compte ou pas.

Selon Marie Portelance, thérapeute en relation d’aide, une limite peut concerner :

  • l’espace vital (la bulle autour de son corps) ;
  • l’espace corporel (son corps, sa santé) ;
  • l’état psychologique (dignité, sensibilité, vulnérabilité) ;
  • l’environnement matériel (lieux de vie, biens, horaires) ;
  • les besoins spirituels (opinions, croyances). 

Les limites personnelles permettent d’exprimer ce que nous voulons véritablement dire, et non ce que l’on pense que les autres voudraient entendre. Cependant les limites ne sont pas figées définitivement, elles évoluent dans le temps. Elles peuvent être repoussées ou rapprochées, en fonction des changements dans nos vies.

Les différentes limites

Il existe deux types de limites : celles qui sont limitantes et celles qui sont aidantes.

Les limites « limitantes » sont des injonctions négatives que l’on s’impose : je n’ose pas…, je suis nul en …, je ne sais pas faire…, je n’en suis pas capable… je suis comme cela ! Il s’agit de croyances héritées de notre enfance ou qui sont développées ultérieurement au cours de la vie. Ces limites sont des comportements qui nous empêchent de passer à l’action, et qui augmentent notre zone de contrainte.

Les limites « aidantes » sont celles qui nous permettent d’être nous-mêmes tout en respectant les autres. Elles nous protègent de ce que nous ne voulons pas. Elles nous aident à nous respecter et à vivre en accord avec nos valeurs, sans nous comparer aux autres. Elles nous permettent d’élargir notre zone d’influence.

Identifier ses limites

Dans une société de performance, il peut être mal vu d’admettre que nous avons des limites. Toutefois, plus nous apprenons à nous connaître, plus nous sommes conscients de nos limites.  

Pour éviter les pensées négatives à posteriori, telles que « il a poussé le bouchon trop loin », « c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase », voire « je ne le supporte plus », il est essentiel de connaître ses limites pour repérer ce que l’on accepte et ce que l’on ne veut pas accepter.

Définir ses limites exige en premier lieu de prendre le temps de s’écouter :

  • Qu’êtes-vous disposé à tolérer des autres ?
  • Les émotions des autres sont-elles plus importantes que les vôtres ?
  • Quels sont les gestes ou les paroles qui vous blessent ?
  • Qu’est-ce qui vous donne le sentiment de ne pas être respecté ?

En poussant la réflexion, demandez-vous quelle peur se cache derrière l’acceptation de ces situations insupportables ?

Prenez le temps de les noter, sans vous laisser influencer par votre entourage. Clarifier vos priorités et vos besoins, tant dans le domaine privé que professionnel, évitera la confusion dans votre esprit au moment de faire vos choix. Poser ses limites, c’est choisir de se faire confiance. Une fois identifiées, nos limites peuvent être clairement énoncées et partagées.

L’être humain est par nature un être social. Mais comment établir des relations saines tout en restant parfaitement soi-même ? Il est toujours plus difficile de communiquer sur le franchissement des limites, une fois que cela a eu lieu. D’où l’importance d’apprendre à exprimer clairement ce que vous pensez et ressentez. Comme personne n’a les mêmes limites, il est préférable de « donner le mode d’emploi ». Tant que nous n’exprimons pas distinctement les choses, nous n’avons aucune chance d’être entendu.

En fait, la communication sur nos limites fait peur. Sans savoir comment les exprimer, elle nous met dans une posture de vulnérabilité, En effet elle nous expose potentiellement à un rejet ou à une confrontation.

Donner son mode d’emploi

Pour éviter d’employer le « tu », reçu comme un reproche ou une accusation, je vous propose d’employer le « je » et de parler de ses ressentis : « je n’aime pas …», « j’ai la sensation que … », « je n’accepte pas … ». Pour faciliter l’apprentissage de cette posture inhabituelle, je vous suggère de vous entrainer, en choisissant, au départ, des situations où l’enjeu est moindre.

Les freins à la mise en place des limites

Le fait de répondre « oui » à une demande déclenche une série d’émotions positives qui flattent notre égo : fierté, plaisir, voire reconnaissance. Inversement, le fait de dire « non » nous renvoie à des émotions négatives. Nos comportements sont alors dictés par la peur. Nous pouvons avoir peur de l’autorité, de faire du mal, du conflit, de la perte d’un client, d’un travail ou d’un être cher. Pourquoi est-il aussi difficile de refuser l’intrusion de ses parents dans sa vie personnelle, de dénoncer l’égoïsme d’un ami ou de freiner la surcharge de travail imposé par une collègue de bureau ? L’amour de l’autre est-il plus important que l’amour que l’on se porte ?

Les causes connues sont nombreuses : la peur de décevoir, de s’opposer, de perdre l’affection des autres ou le fatalisme (c’est comme cela, je n’ai pas le choix). Cela peut aussi révéler un manque de confiance en soi. C’est aussi une question de gestion des émotions : contrer quelqu’un, refuser un service génère un inconfort lié à la peur de faire de la peine.

Importance de mettre en place ses limites

Fixer ses limites personnelles est un geste de bienveillance envers soi-même et d’honnêteté vis-à-vis des autres. Dans la vie, il est vital de marquer des limites vis-à-vis de soi-même et vis-à-vis des autres. Poser des limites permet de se protéger, de se respecter et d’exploiter ses potentialités. Cette attitude induit de nombreux bénéfices : le renforcement de l’estime de soi, la satisfaction de son besoin de sécurité et de son besoin de reconnaissance, la construction de relations sociales. Alors si difficile que cela puisse paraître, poser ses  limites est un véritable investissement sur l’avenir. L’attitude inverse peut énerver, épuiser et finalement rendre malheureux. Le fait de dire de vrais « oui » et de vrais « non » permet de cesser de subir. L’effort injustifié que vous vous imposez par peur de mettre vos limites vous fragilise et fait monter votre stress. Dans ces conditions, une contrariété, un jugement, un obstacle peut déclencher une réaction inopportune et non maîtrisée.

Nous sommes en permanence confrontés à des choix et à des prises de décisions. Savoir s’affirmer et prendre sa place est essentiel. Dire « non » à ce qui ne nous convient pas, c’est dire « oui » à ce que l’on veut vraiment. C’est retrouver la maîtrise de son temps, de son espace et de ses ressources !

Le pouvoir de dire « non »

Savoir dire “non”, avec bienveillance, c’est s’accorder de la valeur et s’écouter. C’est aussi prendre en considération son interlocuteur. Savoir dire “non”, c’est choisir d’avoir des relations authentiques avec soi-même et avec les autres. C’est un acte de courage et de responsabilité. Car dire « non » peut impliquer de renoncer à certaines personnes ou à certains projets. Il faut en assumer les conséquences. C’est aussi savoir accepter de recevoir un “non” avec sérénité. Cependant, savoir dire « non » n’est pas naturel pour tout le monde.

Comment dire « non » aux autres ?

Tous les gens qui franchissent vos limites n’ont pas forcément de mauvaises intentions. Il est préférable d’agir comme s’il n’y avait pas de malice dans leurs actions ou dans leurs paroles. En revanche, quand vous sentez monter en vous angoisse et contrariété, “attention”, il est temps d’analyser cette émotion. Pour ce faire, vous avez besoin de temps pour répondre, au lieu de réagir sans tenir compte de votre ressenti ! En effet ; pourquoi répondre du tac au tac ? Retenez votre réponse, en prenant un temps de réflexion :

  • faites une réponse d’attente : « je vais y réfléchir »
  • reformulez la demande de votre interlocuteur : « ce que tu me demandes, c’est de te remplacer demain à la réunion pour parler d’un sujet que je ne maîtrise pas. »

Pour autant, il est essentiel de faire preuve de tact lorsque vous répondez par la négative à quelqu’un. L’assertivité, l’aptitude à exprimer et à défendre ses idées sans agressivité envers autrui, est une compétence fondamentale pour gérer avec diplomatie ces situations délicates. Vous ne cherchez pas à blesser, vous apprenez à l’autre qui vous êtes. Recherchez l’accord, proposez une solution alternative et ne formulez pas d’accusations. Il est primordial d’éviter l’affrontement, source de malentendus. Cependant, je vous conseille de ne pas vous engager dans un débat qui peut durer.

Conseils du coach

Poser ses limites est nécessaire pour ne pas se laisser déborder par ses émotions. Mais dire « non » n’est pas si facile. Cela s’apprend. Il s’agit en premier lieu d’identifier ses limites en apprenant à mieux se connaitre. Ensuite, il est essentiel de prendre la responsabilité de votre « non » et de garder à l’esprit que l’autre a le choix de sa réaction face à cette attitude. Face à une situation qui ne vous convient pas ou qui vous fait souffrir, je vous propose de suivre les étapes suivantes :

  • prendre le temps d’écouter sa petite voix intérieure, d’observer ses émotions et son ressenti ;
  • identifier clairement la limite qui vient d’être franchie ;
  • accepter les conséquences de votre réaction en affrontant vos peurs ;
  • annoncer clairement ce qui vous dérange et donnez les raisons de votre malaise.

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