La stratégie au service de la performance en entreprise

Longtemps, la stratégie a constitué un domaine réservé aux militaires. C’était l’art de gagner la guerre. Ainsi la stratégie militaire est la matrice de toute stratégie. Appliquer les fondements de la stratégie, c’est poser les bases de la réflexion pour rendre les entreprises plus performantes.

« La stratégie est la conjugaison de la pensée et de l’action, la promotion de l’intelligence dans le domaine de l’action » Général Gilles Fiévet

Qu’est-ce que la stratégie ?

Le mot « strategos » a des origines athéniennes et militaires : il signifie «conduire  une armée».  La stratégie est l’art de diriger et de coordonner des ressources humaines et matérielles pour atteindre un objectif précis. Avant tout, elle consiste à mettre une collectivité en mouvement dans un environnement incertain. Il n’existe pas de stratégie « standard ». Comme tous les sujets complexes, elle exige une démarche méthodique et coopérative. C’est pourquoi, une bonne stratégie se construit en coopération avec l’ensemble des parties concernées.

La stratégie est un pari conscient et réfléchi sur l’avenir. Selon Bergson «l’avenir, ce n’est pas ce qui va nous arriver, mais ce que nous allons faire ». Toute pensée stratégique est spécifique car la stratégie et son stratège sont indissolublement liés. La stratégie est la conjugaison de la pensée et de l’action.

Stratégie et tactique

Associée ou confondue, la stratégie et la tactique sont deux notions étroitement liées, mais fondamentalement différentes. En effet, une réflexion stratégique a vocation à déterminer les objectifs dans le temps long. Une stratégie n’a pas vocation à être revue à la moindre difficulté. Sa  réévaluation a une fréquence faible car la perspective est définie à long terme. En revanche, la tactique épouse les circonstances. Elle est plus mouvante et plus flexible.  Il y est question de manières d’agir, d’adaptation au quotidien et de gestion des difficultés. Par conséquent, la tactique n’est pas figée comme doit l’être la stratégie. En fait, l’obsession du court terme peut parfois obscurcir la réflexion stratégique. En réalité, la stratégie vise à gagner la guerre, la tactique à remporter la bataille.

Les cinq facteurs de la stratégie selon Sun Tzu

L’Art de la guerre, a été écrit il y a 2500 ans,  par Sun Tzu, général chinois du Vème siècle avant notre ère. « L’art suprême de la guerre consiste à dompter son ennemi sans même se battre. » Son objectif était de gagner la guerre sans combattre, grâce à la ruse, l’espionnage et une grande mobilité. Par conséquent, gagner ou perdre une guerre est une question de stratégie. Ce livre énonce au lecteur les cinq éléments à prendre en compte dans l’élaboration d’une stratégie :

  • En premier lieu, la Vertu, représente le sens porté par l’organisation, l’âme de l’entreprise. Elle assure la cohésion entre ses membres. Elle incite « les soldats à accompagner leur chef dans la mort comme dans la vie, sans crainte du danger ».
  • Secundo, le Ciel,  associe les conditions climatiques, l’ombre et la lumière ainsi que le cycle des saisons.  Ce sont les facteurs qui bougent, les événements qui concernent l’environnement économique, technique, réglementaire ou politique.
  • Ensuite, la Terre, représente la géographie : le proche et le loin, les terrains ouverts et les passages étroits, les plaines et les montagnes. C’est la composante fixe : les activités, le marché, les clients, les concurrents et les partenaires.
  • En plus, la Règle, concerne l’efficacité de l’organisation, la discipline, la hiérarchie et la logistique. C’est l’ensemble des règles et des procédures mis en œuvre par l’entreprise pour réaliser ses activités et pour assurer une bonne gouvernance.
  • Enfin, le Commandement, s’identifie en la personne du dirigeant. Pour Sun Tzu, la qualité des liens entre le général et ses troupes, entre le prince et ses sujets, entre le chef d’entreprise et ses collaborateurs, est la meilleure garantie de l’invincibilité.

Qu’enseigne Sun Tzu à un chef d’entreprise

Malgré son âge vénérable, l’Art de la guerre est encore utilisé au 21ème siècle. Ses principes ont même été adaptés pour la stratégie d’entreprise. Pourtant ce n’est pas un livre de recettes à appliquer. Cet ouvrage livre une certaine philosophie. C’est un traité sur la vie et sur l’organisation de la vie collective.

  • « La guerre est une affaire sérieuse, il ne faut pas s’engager à la légère. Il faut être prêt en tout temps, mais attaquer que s’il y a une bonne raison et quand c’est le bon moment. »

L’Art de la guerre s’appuie, entre autres, sur un principe général d’économie des forces. En réalité, la meilleure bataille est celle que l’on n’a même pas besoin de livrer.

  • « Le général est symbole de connaissance, de confiance, de courage et de rigueur. » En fait, un salarié qui se sent indispensable au sein d’une équipe sera beaucoup plus performant et dévoué à son entreprise. Rendre hommage et reconnaître les bonnes initiatives de chacun de ses soldats est l’unique façon de les faire adhérer à un projet commun.
  • « Connais ton ennemi et connais-toi toi-même eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois vous serez victorieux

En conséquence, avant d’attaquer un marché, diagnostiquez la situation. Réalisez des  analyses sur forces, faiblesses, opportunités et menaces permet de mieux connaitre votre organisation et la concurrence.

  • « Si le général est généreux, mais incapable de diriger, bienveillant, mais incapable de rétablir l’ordre, ses soldats, tels des enfants gâtés, seront inutiles. »                                        

Tout compte fait, la stratégie est l’affaire d’un homme qui possède une vision, poursuit un objectif et met en œuvre tous ses moyens pour réussir.

  • « Lorsque l’ennemi est uni, divisez-le; et attaquez là où il n’est point préparé, en surgissant lorsqu’il ne vous attend point. Telles sont les clefs stratégiques de la victoire. »

Autrement dit, c’est en surprenant la partie adverse que l’on se met en situation d’obtenir le maximum, en consentant un minimum d’efforts.

Points communs et différences contextuelles

Somme toute, il convient de rester prudent quand on établit des parallèles entre stratégie militaire et stratégie d’entreprise. Force est de constater que les analogies ne manquent pas entre les deux contextes. De fait, dans les deux cas, ce sont des conflits d’intérêts. Le principe de polarité s’applique aux deux situations. Chacun des partis cherche à augmenter sa puissance aux dépens de l’autre. Enfin l’incertitude préside au contexte de la prise de décision.

En revanche on peut noter un certain nombre de différences entre les deux contextes. On compte plus d’acteurs dans le contexte économique que dans le contexte militaire. Le schéma traditionnel de l’affrontement militaire entre deux adversaires ne peut pas être transposé à l’entreprise car c’est le client qui décide du sort des « armes ». La nature des activités est différente car la bataille économique implique de prendre une part de marché et non la destruction physique d’un ennemi.

Compte tenu de ces disparités, la stratégie militaire ne saurait être utilisée telle quelle dans l’entreprise.

La stratégie au XXIème siècle

Pour le général Desportes, qui a été conseiller-défense du Secrétaire général de la défense nationale : « l’entrée en stratégie est vital pour le succès de toutes les entreprises humaines d’une certaine ampleur ». Or les dirigeants, quel que soit leur champ d’action, sont centrés sur le court terme. Les patrons de petites ou moyennes entreprises sont accaparés par le quotidien. De même, ceux des grandes entreprises sont obsédés par la dictature des résultats trimestriels ou annuels. En effet, il est plus facile de calculer et d’exploiter le temps court que le temps long. Ils ont tendance à privilégier les bénéfices rapides au détriment de la création de valeur à long terme. Il est nécessaire que les dirigeants s’obligent à «entrer en stratégie». Pourtant, l’exercice stratégique est hasardeux car c’est un pari sur l’avenir. Il vaut donc mieux s’y aventurer fort d’une bonne compréhension de ce qu’il est et de ce qu’il sera.

Concevoir une stratégie d’entreprise

En discutant avec des groupes de dirigeants, l’un des points récurrents est celui du manque d’adhésion à la vision stratégique. En réalité, la raison première est à rechercher dans la conception et la formulation de la stratégie. Quel serait le meilleur moyen pour établir la confiance avec les salariés, condition sine qua non de sa réussite ?

  • Faire vivre la vision de l’entreprise en donnant la parole à un groupe multidisciplinaire et inter-hiérarchique. Dans ces conditions, cela favorise l’appropriation de la démarche.
  • Prendre appui sur les salariés pour faire l’état des lieux : forces, faiblesses, opportunités, menaces, mais aussi étude du marché et besoins des clients. En effet, cette méthodologie permet d’engager les salariés dans l’action et de rapprocher terrain et direction.
  • A partir des résultats, faire des choix et définir les priorités, peu nombreuses. Dans l’ensemble, cette étape permet d’aligner l’action de l’entreprise et d’éviter l’éparpillement des ressources.
  • Élaborer un plan d’action définissant qui fait quoi ? dans quels délais ? comment ? avec quoi ? Il précisera en particulier la mise en place du suivi de l’application du plan.
  • De surcroît, accompagner les managers de terrain. Cette implication de la chaîne managériale lui permettra de jouer son rôle de relais montant et descendant. Elle favorisera la remontée des décalages et permettra de se concentrer sur la gestion des priorités.

Aux prises avec la complexité, l’entreprise du 21ème siècle doit rechercher le cumul des intelligences et développer une prise de responsabilité réelle.

Conseil du coach

La stratégie, c’est la question d’un avenir à vouloir puis à construire avec et malgré le présent. C’est pourquoi cela exige vision, courage et capacité d’adaptation. Ainsi, celui qui entre en stratégie doit penser en architecte et non en maçon.

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